Psychologie, éducation & enseignement spécialisé
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Enfants « turbulents » et annonce d’un handicap :
la violence faite aux familles

 

 
Un texte de Pascal Ourghanlian
Professeur des écoles spécialisé
Référent pour la scolarisation des élèves handicapés


Publication originale  Article initialement paru dans le Le Journal des psychologues, n° 255, mars 2008, pp. 37-41
Article en lien  Sur un thème proche, lire un autre article de Pascal, Ahmed – de l’école ordinaire à l’institut de rééducation.
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Pétition  Voir sur cette question la pétition Les élèves en difficulté à l’école ne sont pas tous des enfants handicapés !

 

Présentation
La mise en œuvre de la loi du 11 février 2005, qui nécessite de passer par une saisine de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) pour orienter les enfants « turbulents » vers les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), est source de nombreuses difficultés… À confronter les concepts de « handicap » et de « turbulence » et à mélanger les besoins de tous, on court le risque de se trouver dépourvu d’aides pour chacun. Pour les enfants handicapés, une logique propre de compensation est à poursuivre ; pour les enfants « agités », une réflexion éducative est à mener.
 

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La loi du 11 février 2005(1) est une loi de solidarité nationale qui, par la mise en œuvre d’un plan de compensation du handicap répondant aux besoins exprimés par la personne handicapée dans son projet de vie, vise à rapprocher du droit commun l’exercice, par les personnes handicapées, de leur citoyenneté(2). Rapporté aux enfants et aux adolescents, cet objectif conduit, en particulier, à préciser que la scolarisation en milieu ordinaire est la règle et que « tout enfant [...] présentant un handicap [...] est inscrit dans l’école [...] [la] plus proche de son domicile(3) ».

Cette loi d’équité civique – d’adoption bien plus tardive en France qu’aux Pays-Bas (1967) ou en Italie (1971), par exemple – a été portée, dans un combat au long cours, parfois douloureux, par les grandes associations de personnes handicapées ou de leurs familles et ses conséquences sur la vie quotidienne de près de 1,3 million de personnes actives(4) et 235 400 élèves scolarisés(5) doivent encore être examinées.

 

Un concept a priori bienveillant

La scolarisation des enfants différents au cours du XXe siècle

Un regard sur la scolarisation des enfants différents en France permet de définir trois temps relativement tranchés dans l’histoire récente. Une première période fait passer de l’attention aux enfants arriérés (1909) à l’intérêt pour les enfants déficients (1936), tout en les maintenant à l’écart (période de ségrégation). Au cours de la deuxième période, c’est la question de l’adaptation qui devient centrale : on passe de la notion d’élèves inadaptés à l’école (1943) à celle d’adaptation de l’école à l’élève (1970). La troisième période, autour d’une interrogation générale sur la place de la personne handicapée dans la société française, pose la question de l’intégration (1975), désormais relayée, sous des influences anglo-saxonnes et nordiques non négligeables, par celle de l’inclusion (2005).

Ce survol rapide permet d’apercevoir que la manière qu’une société (ou son école) a de faire une place aux enfants différents dépend du regard qu’elle porte sur eux, regard inextricablement lié à son projet politique, subordonné lui-même aux conditions socio-économiques, historiques, culturelles, internationales, dans lesquelles il se développe, et que ce regard, de manière générale, a évolué vers une plus grande bienveillance.

La question du handicap

Pour la première fois en France, la loi du 11 février propose une définition du handicap, à l’aune de laquelle doivent s’évaluer les situations et se définir les plans de compensation : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant. » (Art. 2, art. L-114.)

Cette définition a beaucoup à voir avec la manière nouvelle dont cette notion est désormais appréhendée depuis les travaux de Phillip Wood, qui fait du handicap une interaction entre les déficits propres à la personne et les limitations induites par son environnement, et dont la représentation schématique suivante peut être proposée :

Schéma

La question que pose cette définition, qui n’est pas négligeable, est celle de son champ d’application ou, plus encore, celle des personnes auxquelles elle s’applique, comme nous le verrons plus loin. Pour autant, elle atteste de l’engagement désormais reconnu de la société française envers chacun de ses membres.

 

Des enfants qui exaspèrent

De qui parle-t-on ?

Tel enfant court partout, tel autre tient tête à sa mère, ce troisième parle à n’en plus finir, cet autre encore se met en colère sans raison apparente. Chacun, dans ses propres souvenirs d’enfance, ou dans sa vie quotidienne de parent, a rencontré ou rencontre des enfants variés répondant à ces descriptions successives. Lorsqu’un enfant réunit à lui seul ces quatre éléments descriptifs, sa rencontre n’est pas nécessairement moins rare, mais sa fréquentation devient plus difficile.

Ce qui est difficile, d’ailleurs, plus que sa fréquentation, ce sont les regards que portent sur lui les autres personnes et que, pour peu que vous en soyez la mère, le frère ou un quelconque membre de son entourage, vous prenez pour vous autant que pour lui : « Encore un qui n’est pas élevé », « Voilà ce que c’est que de leur laisser faire ce qu’ils veulent », « Ce serait le mien, je lui mettrais une bonne paire de claques », etc.

Une question de regard

Il y a là une interaction entre un comportement observable et un jugement porté sur ce comportement en référence à une norme, personnelle ou sociale, éminemment subjective à la personne qui le porte ou relative au contexte d’énonciation.

Il se trouve que ces enfants sont décrits, dans des tentatives nosographiques essentiellement d’origines nord-américaines, comme ayant des « comportements perturbateurs »(6). Ces mêmes descriptions, qui ont une visée diagnostique, proposent de reconnaître dans ces comportements des signes de maladie à soigner, sinon à guérir. Pour peu qu’un praticien, de lui-même, à la demande de la famille et-ou d’une institution, estime que ce trouble soit « invalidant », l’enfant ainsi caractérisé entre alors dans la catégorie des enfants handicapés et, d’une observation ordinaire (même s’il conduit parfois l’observateur « à bout »), l’on passe subrepticement à une « altération substantielle, durable ou définitive ».

 

Quand l’autre est différent

Une « altération », c’est ce qui rend autre, non pas seulement au sens de différent, ce qui serait un truisme, mais dans le sens d’une rupture de nature.

Se posent alors de bien redoutables questions. Jusqu’où le handicap n’est pas une différence comme les autres (la couleur des cheveux ou de la peau), mais un élément constitutif, intrinsèque, de ce qui fonde l’unité de la personne ? Et en quoi cette « différence » fait de cet autre différent un être humain de même valeur, existentiellement, que moi ? J’ai tendance à penser que c’est bien nos différences qui nous rapprochent – et non nos ressemblances, qui nous poussent à chercher le même dans l’autre, dans une indifférenciation dont Narcisse est mort – il faut être deux pour être un... Mais, dans le même temps, j’ai tendance à penser que le handicap fonde un rapport au monde essentiellement différent de l’« ordinaire ». Tout, dans le rapport au monde, est changé lorsqu’on est handicapé : le regard des autres, le rapport à soi, la vie sexuelle, le chant des oiseaux – comme une exacerbation généralisée de ses ressentis propres. Je dirais volontiers : on est tous « autistes » quand on est handicapé, dans ce que l’on sait du rapport hypersensible au monde des personnes avec autisme, de leur vécu de la relation à l’autre comme terriblement périlleuse ou de leur besoin compulsif d’une position moins insécure de soi-même dans le monde. La personne sourde, troublée, en fauteuil, vit – je crois – sa vie dans ce rapport-là aux êtres et aux choses.

Et, tout à la fois, c’est là que le « qui en fait un être unique » devient à son tour problématique : à ne voir que ce qui est différent, unique, on ne perçoit plus ce qui est commun, ce qui fait de la personne handicapée une personne comme les autres, et pas seulement « en droit ». La mise en avant du handicap devient alors élément d’une discrimination, pas positive du tout celle-là (et des aventures politiques européennes, pas si éloignées dans le temps, nous rappellent que cette tentation-là est toujours vivace, et peut être réactivée par quelques bulletins de vote...).

Cette oscillation permanente entre le général et le particulier, entre le souci de chacun et la nécessité d’une réponse commune, entre l’enfant handicapé vu tout d’abord comme un enfant ou encore comme un handicapé crée une tension (une approche plus marxiste dirait une « dialectique ») qui donne à ce qu’interroge la loi de 2005 toute sa force terrible. La question, ici, c’est : jusqu’où je suis humain ? jusqu’où je suis différent ? jusqu’où je suis comme les autres ?

Un consentement libre et éclairé ?

Les parents exaspérés, autant par le comportement de leur enfant que pour ce que leur entourage en dit, et qui « consultent »... à quel moment se sont-ils dit « notre enfant est handicapé » ? Jamais, sans doute, encore, dans l’intime de leur douleur. Et ils s’entendent dire : « Pour aider votre enfant, il faut mettre en place une psychothérapie. Il y a six (huit, douze, déclinez à l’envie...) mois d’attente dans le service public ; ayez recours à un thérapeute en libéral. Vous ne pouvez pas payer ? On va faire une demande d’aeeh auprès de la MDPH. » Ou bien : « Votre enfant a besoin d’être accompagné dans ses apprentissages à l’école. On va faire une demande de PPS et d’avs. » (J’utilise volontairement ces abréviations absconses(7) : combien de personnes les connaissent ou combien de temps ces personnes vont-elles mettre avant de découvrir que ce qu’ils pensaient être une aide financière de type Sécurité sociale réfère au handicap ?)

Et l’on passe d’une difficulté réelle, mais réactionnelle, éducative, qui faisait de vous un mauvais parent dans le regard des autres, à une mise à l’écart, qui fait de votre enfant un handicapé, dont l’altération (de quelle substance ? de quelle humeur ? la bile ? la lymphe ? le sang ?) est désormais durable ou définitive...

Le législateur peut être de bonne volonté. Et, dans le contexte d’une démocratie participative, il lui revient de représenter le peuple. Les conséquences positives d’une loi ne peuvent se faire sentir qu’à distance. En revanche, les dérives, les implications négatives, c’est dès qu’elles apparaissent qu’il convient de les pointer et, dans la mesure du possible, de les amender, y compris dans le cadre d’actions citoyennes.

Car, si la devise de la République, « Liberté, Égalité, Fraternité », a un sens, c’est lorsqu’elle pose que la liberté de l’autre est exactement égale à la mienne. Car cette égalité rigoureuse, absolue, rend possible la fraternité, qui nous permet de vivre ensemble de manière attentionnée à l’Autre, dans la bienveillance et la prévenance.

Que les enfants turbulents aient besoin qu’on les écoute, qu’on les aide, ne doit pas nécessairement conduire à utiliser pour eux des dispositifs qui ont leur pertinence et leur utilité pour d’autres membres du corps social, avec lesquels ils ne devraient pas avoir à entrer « en concurrence », même si leurs besoins sont similaires, et qui, eux aussi, ont eu à lutter pour que leur soient reconnus des droits : les personnes dont l’altération substantielle d’une fonction les met, en relation avec un certain environnement, en situation de handicap.

Reste alors, pour les enfants turbulents, à arpenter sans cesse le vaste champ de l’éducatif. Car s’y trouve l’essentiel des ressources de notre responsabilité d’adultes, d’accompagnants, de prévenants : la croyance indéfectible en l’éducabilité de chacun...

 

Ahmed ou la violence de l’annonce

Pour illustrer cette réflexion, voici l’histoire d’Ahmed telle qu’elle se laisse entrapercevoir à travers les comptes-rendus des équipes éducatives qu’il a rencontrées au cours de deux années scolaires.

Octobre 2006

Ahmed est « signalé » par l’école comme ayant des difficultés de comportement depuis l’année scolaire de petite section (2002-2003). Il bénéficie d’un projet d’intégration (désormais PPS) depuis quatre ans. Ces difficultés se manifestent par des troubles ayant des incidences sur sa conduite, et ce, malgré une prise en charge de longue date en psychomotricité, faute d’une psychothérapie qui n’a pu se mettre en place.

La situation est décrite par l’enseignante comme extrêmement difficile. Après un premier mois au cours duquel Ahmed a été réceptif aux apprentissages jusqu’à la récréation du matin, la situation s’est dégradée par la suite au point qu’il est désormais dans le refus de tout travail scolaire, dans un rapport de force permanent et de violence pendant les récréations. Mais Ahmed est à l’école de 8 h 30 à 18 h 30, « non stop »... ce qui est manifestement insupportable pour lui. Par peur de l’échec, il refuse de montrer ce qu’il sait ; les réponses sont stéréotypées, comme une paraphrase de ce qu’il croit qu’on attend de lui. Il « joue » à l’élève. Cependant, ses capacités sont réelles, il est entré dans la lecture et les évaluations de CE1 ne sont pas catastrophiques.

En psychomotricité, en relation duelle, plus régulièrement qu’auparavant, des points d’appui se font jour : Ahmed vit de manière plus apaisée un grand espace plutôt qu’un espace réduit, il est capable de mener une tâche jusqu’au bout, prend le risque de se mettre en échec, entre dans la trace écrite. Tout se passe comme s’il y avait un déplacement de l’investissement dans le scolaire sur le temps de rééducation.

Les aides actuellement en place autour d’Ahmed, si elles ont sans doute permis que la situation ne se dégrade encore plus, semblent désormais marquer leurs limites. Son comportement est manifestement un appel à l’aide qui doit être entendu, tant sur le plan scolaire (nécessité d’un cadre repérable, sécurisant, ferme mais souple, valorisant ; contractualisation d’un « code de bonne conduite » avec permis à points et classe d’accueil ; réflexion sur l’opportunité d’une aide à dominante rééducative ; adaptation des objectifs scolaires aux possibilités actuelles) que sur le plan des soins (mise en place d’une psychothérapie). Pour cela, l’adhésion de la famille et son implication sont à rechercher une fois encore.

Février 2007

Des événements récents de mise en danger de lui-même et d’appels à l’aide répétés (comportementaux et-ou verbaux), avec des éléments dépressifs, conduisent à prendre en urgence les décisions suivantes :

Juin 2007

Le dispositif exceptionnel (matin en CP avec le travail du CE1, après-midi en CLIS), mis en place depuis trois mois pour qu’Ahmed puisse à nouveau s’inscrire dans son rôle d’élève et participer aux apprentissages de CE1, a donné des résultats satisfaisants. Il a ainsi pu progresser dans les apprentissages de fin de cycle 2 et se mettre en position de tirer profit de ceux de cycle 3 à la rentrée prochaine – ce qui montre bien qu’il est envahi par des problématiques complexes pour un enfant de neuf ans qui l’empêchent de penser, alors qu’il en est parfaitement capable.

Il n’est pas envisageable de prolonger ce dispositif au-delà de la fin de cette année, les conditions ne s’y prêtant pas et, surtout, Ahmed devant désormais venir à l’école, pour y apprendre et non pour y régler les difficultés qui sont les siennes de manière violente envers les autres.

Chacun s’accorde à dire, depuis longtemps, que les aides apportées à Ahmed dans les domaines éducatif et thérapeutique sont insuffisantes. Il n’y a plus lieu désormais de différer les décisions qui semblent les plus à même de l’aider, d’autant qu’il traverse de nouveau une période de grande instabilité : une saisine de la MDPH pour une orientation vers un ITEP est explicitée à la famille. Dans le même temps, la proposition d’une psychothérapie régulière et soutenue est adressée.

Septembre 2007

Ce début d’année montre que la contrainte scolaire est toujours aussi difficile à vivre pour Ahmed, surtout en grand groupe et-ou en extérieur, mais aussi au sein du groupe classe, où il lui est insupportable de ne pas savoir (réaction de prestance) comme d’entrer dans de nouveaux apprentissages (réaction de refus) – tout comportement « habituel » qui dénote une profonde angoisse que les seuls soins en psychomotricité (quand ils sont honorés) ne suffisent pas à apaiser.

Il est désormais nécessaire d’accélérer le processus de décision d’une orientation (itep) et-ou d’une prise en charge en service de soins et d’accompagnement à domicile (sessad) pour tenter d’éviter à Ahmed d’entrer dans la préadolescence avec une personnalité mal assurée et peu respectueuse des cadres relationnels et sociaux.

Sont à rechercher le rapprochement entre les services sociaux en charge de l’évaluation de la situation (service d’investigation et d’orientation éducative, SIOE), du suivi des soins (AS CMP) et de l’enseignant référent en charge du projet personnalisé de scolarisation, d’une part ; ainsi que la prise en compte par l’ensemble des membres de la famille des besoins spécifiques d’Ahmed (conseil de famille), d’autre part.

Décembre 2007

L’éducatrice du SIOE informe l’équipe que le papa et la maman ont cosigné, auprès du psychiatre référent, une demande d’orientation vers un ITEP, mais la maman se montre réservée quant à l’opportunité d’un internat. Il est rappelé que l’orientation est une première démarche, mais que ses modalités de mise en œuvre (internat ou non) relèvent du projet contractualisé entre la famille et l’établissement, et que ni l’école ni le SIOE n’interviennent dans ce processus.

Ce projet reste pertinent dans la mesure où la situation scolaire tend à s’aggraver, Ahmed étant de moins en moins réceptif aux apprentissages : depuis cinq ans, la situation – chaque année relayée par l’école – ne cesse de se détériorer. La crainte de chacun est qu’elle ne soit plus maîtrisable lorsqu’Ahmed entrera dans la préadolescence. On peut d’ailleurs s’interroger sur la représentation qu’Ahmed peut se construire dans une situation où c’est lui qui est le « maître du jeu » et où les adultes sont au bout de ce qu’ils savent faire.

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Ce copier-coller de comptes-rendus d’équipes éducatives montre combien Ahmed est un enfant « difficile », un de ces enfants « hors la loi », sans doute moins par défaillance de l’encadrement familial et-ou éducatif que par difficulté à s’identifier à un père/pair tout en s’individuant, en se distanciant et en gagnant en autonomie.

Des réponses éducatives étaient certainement nécessaires (par l’accompagnement des parents dans des gestes du quotidien pas toujours posés) ; des réponses pédagogiques aussi (par le recours à un cadre inspiré de la pédagogie institutionnelle, mais qui ne peut être imposé aux enseignants).

Tel n’a pas été le cas pour Ahmed : parce que le temps de la prise de conscience de la famille (et donc de la mise en place des soins), le temps de l’enfant (aux prises avec des enjeux qui le dépassent) et le temps de l’école (qui fonctionne en année scolaire) ne coïncident pas.

Ces temps qui ne se superposent pas ont conduit, inexorablement, à une situation que plus personne ne maîtrise et Ahmed à se trouver face à « des difficultés psychologiques dont l’expression, notamment l’intensité des troubles du comportement, perturbe gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages. [Il] se trouve, malgré des potentialités intellectuelles préservées, engagé dans un processus handicapant qui nécessite le recours à des actions conjuguées et à un accompagnement personnalisé »(8).

« Processus handicapant » signifié de façon violente à la famille (aux enseignants et aux services de soin, aussi) par le passage obligé, pour Ahmed, par la MDPH...

Pascal Ourghanlian
Mars 2008

 
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Notes

(1)  Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », Journal officiel n° 36 du 12.02.05.

(2)  Art. 11 (art. L. 114-1-1 du Code le l’action sociale et des familles). La compensation vise à remédier aux causes individuelles du handicap ; l’accessibilité aux causes environnementales.

(3)  Art. 19 (art. L. 112-1 du Code de l’éducation).

(4) « Sur les 4,9 millions de personnes recensées par l’INSEE indiquant une limitation de leur capacité de travail, seulement 1,3 million bénéficient actuellement du statut de travailleur handicapé », AGEFIPH, mai 2007.

(5) DREES, Études et résultats, n° 564, mars 2007.

(6) Le DSM-IV (Diagnostic and Statistical Manual – Révision 4), dont la première version a été publiée en 1994, par l’American Psychiatric Association, répartit ces troubles en un ensemble disparate d’« observables » qui se caractérisent par leur hétérogénéité et leur aspect éminemment subjectif.

(7)  AEEH : allocation d’éducation pour enfant handicapé ; PPS : projet personnalisé de scolarisation ; AVS : auxiliaire de vie scolaire.

(8)  Circulaire interministérielle n° 2007-194 du 14 mai 2007 sur ITEP.

 
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Bibliographie

 
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