Psychologie, éducation & enseignement spécialisé
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Comment la mission de prévention confiée au maître E
peut-elle ouvrir un espace de collaboration avec le maître de la classe ?

 

 
Mémoire de Pascal Ourghanlian
CAAPSAIS Option E – Session de Juin 2004
 


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Sommaire

Introduction
1ère partie : Écriture approchée et prévention : un micro-monde, lieu d’une co-construction possible entre le maître “ordinaire” et le maître E
2ème partie : La prévention : un espace ouvert, lieu d’une co-construction possible entre le maître “ordinaire”et le maître E
3ème partie : La prévention : des outils pour construire un espace commun
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Notes

 
*   *   *
*

Introduction

« Mettre en œuvre un dispositif de prévention », « prévenir les difficultés d’apprentissage et d’adaptation scolaires », « assurer des actions de prévention des difficultés scolaires, de soutien ou d’aide aux apprentissages, dans des situations variées », « participer à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation d’un travail de prévention dans le cadre d’un projet d’école, maternelle et élémentaire » – pour le maître E, qu’est-ce que cela signifie du point de vue d’une pratique professionnelle ?

« Faire preuve d’une réflexion critique sur des sujets tels que la prévention [...] », « partager, avec d’autres professionnels, un langage et des outils de réflexion communs »(1), qu’est-ce que cela signifie comme interrogation sur cette pratique ?

Depuis plus de 30 ans, les textes consacrés à l’AIS ont fait de la prévention des inadaptations une des modalités privilégiées de l’intervention des enseignants spécialisés dans les écoles. Dans le même temps, et de manière tout aussi incitative, particulièrement dans le domaine de la lutte contre l’illettrisme, la même idée a fait son chemin dans les textes consacrés à l’école “ordinaire” sous l’angle de la prévention des exclusions.

La prise en compte de la difficulté scolaire, par tous les acteurs de l’école, semble devoir être le lieu de rencontre de pratiques qui pouvaient paraître jusque-là disjointes et la prévention le moyen singulier de cette rencontre.

Dans quelle mesure et à quelles conditions des actions de prévention créent-elles un espace de concertation pour les maîtres de l’école, dont le maître E(2), pour une prise en charge commune de la difficulté présumée ? C’est cette problématique qui me fait interroger la mise en relation des trois éléments que sont le cadre institutionnel général, le contexte d’un lieu particulier et la pratique singulière qui a été la mienne.

J’essaierai d’abord, me situant sur le plan pédagogique, de préciser comment une activité d’entrée dans l’écrit par l’écriture en début d’année de CP peut être le lieu d’une rencontre entre le maître “ordinaire” et le maître E ; je continuerai ensuite de fixer les contours de cet espace en construction en utilisant la technique de l’analyse d’entretiens avec les acteurs de terrain et institutionnels concernés ; je tâcherai enfin, en prenant appui sur une approche systémique, de proposer une modélisation de la prévention pour tenter de faire de celle-ci le lieu d’une co-élaboration entre les maîtres des classes et le maître E.

 

1ère partie – Écriture approchée et prévention : un micro-monde, lieu d’une co-construction possible entre le maître "ordinaire" et le maître E

A – Le cadre institutionnel

1. Des GAPP aux RASED

Les groupes d’aide psycho-pédagogique ainsi que les sections et classes d’adaptation sont créés en 1970 par une circulaire(3) dont l’objet est « la prévention des inadaptations ». Il s’agit de la mise en place de structures dont la circulaire(4) de 1976 précisera qu’elles « sont une institution pédagogique spécialisée, travaillant au sein de l’école en liaison permanente avec l’ensemble des maîtres ainsi qu’avec tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont normalement les enfants en charge : les parents, les médecins intervenant au titre de la santé scolaire, les personnels du service social scolaire ». Si le travail en partenariat y est nettement évoqué et si une insistance forte est mise sur le maintien « le plus possible dans le milieu scolaire ordinaire », on reste dans une logique plus exclusive qu’intégrative.

La « mise en place et [l’]organisation des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté » par la circulaire(5) de 1990 relève d’une autre logique : on passe d’une politique de structures à une politique de réseau. « La prévention des difficultés des élèves est un objectif qui ne saurait être réalisé par les seuls intervenants spécialisés même si ceux-ci y apportent, par la spécificité de leurs actions, une contribution souvent décisive. Cette prévention concerne tous les partenaires de l’école ». Il s’agit ici de responsabiliser chacun des partenaires, la circulaire(6) de 2002 précisant que « les aides spécialisées s’insèrent dans l’ensemble des actions de prévention et de remédiation mises en place par les équipes pédagogiques auxquelles elles ne se substituent en aucune manière, cette articulation requérant une concertation et des collaborations régulières ».

2. À propos de la prévention

C’est dans cette dernière circulaire qu’est enfin définie l’idée de prévention qui « consiste en un ensemble de démarches qui visent à éviter l’apparition d’une difficulté, son installation ou son amplification »(7).

Cette définition repose sur un postulat :

et trois “fondamentaux” :

3. La prévention de l’illettrisme

C’est dans le cadre de la lutte contre l’illettrisme initiée il y a quelques années que la notion est cernée de la manière la plus pragmatique, particulièrement dans le tout récent livret(8) sur les CP “renforcés”.

Reprenant la typologie en usage depuis fort longtemps dans le monde médical et diffusée depuis une trentaine d’années dans l’Éducation nationale(9), le texte propose de distinguer :

« – la prévention dite primaire par laquelle on s’efforce d’éviter l’apparition des difficultés. Il s’agit à la fois de réduire les facteurs de risque et d’accroître les facteurs “de résistance” ;
– la prévention dite secondaire : il s’agit alors de réduire le développement de difficultés déjà apparues, d’en limiter la durée et la portée ;
– la prévention dite tertiaire par laquelle on vise à réduire les conséquences de déficiences ou troubles avérés et que l’on ne peut éliminer, mais dont on peut limiter l’effet handicapant
 »(10).

Là où ce texte m’intéresse particulièrement, c’est lorsqu’il précise le sens qu’il s’agit d’accorder aux préventions primaire et secondaire : « Pour plus de commodité, pour employer un vocabulaire plus usuel, on peut évoquer :
– l’anticipation, la prévention au sens commun, de difficultés non encore repérées mais que l’on peut craindre connaissant des sources possibles d’embûches ou des obstacles potentiels et les habiletés acquises par les élèves. On s’intéresse alors à un ensemble d’élèves que l’on sait fragiles et on renforce chez eux la capacité à affronter des obstacles constitutifs du parcours commun. On s’inscrit alors dans la logique d’un noyau d’activités communes à la classe dont on ne veut pas “décrocher” les élèves même si on reconnaît la plus ou moins grande distance qui les sépare de l’objectif ;
– la “remédiation”, la réponse apportée alors que des difficultés sont déjà constatées afin qu’elles ne s’enkystent pas. On s’intéresse aux difficultés déjà là, sachant que l’état actuel des acquis conditionne très fortement la possibilité d’avancer et qu’il faut donc éviter
 »(11).

Ces lignes ne sont pas sans rappeler les deux missions assignées aux personnels des RASED, de prévention et de remédiation(12). On trouve-là, dans le cadre très précis de la difficulté d’apprentissage de la lecture-écriture, la convergence complète entre les objectifs que l’institution fixe à ses personnels, qu’ils soient spécialisés ou non.

 

B – Le cadre de mon intervention

Deux impératifs pré-déterminent le cadre de mon intervention : la double inscription dans le respect des prescriptions institutionnelles et dans le contexte singulier de mon lieu de stage.

1. Le cadre institutionnel

Au plan national, il est celui que je viens de rappeler.

Au plan local, dans le cadre de la formation, un stage de pratique accompagné en RASED de deux demi-journées par semaine est organisé sur la base des objectifs suivants : « La période de pratique accompagnée doit permettre à chaque stagiaire d’effectuer une double tâche (remédiation et prévention) orientée par un double objectif (aide aux élèves et aide aux enseignants) ». Et, pour la mission de prévention : « Chaque stagiaire construit avec l’enseignant de la classe concernée un projet de prévention primaire ou secondaire, en maternelle ou en cycle III [...] Ce projet est mis en place hors la classe ou dans la classe (en co-intervention avec l’enseignant) et donne lieu à un document écrit »(13).

2. Mon lieu de stage

Je suis accueilli sur une circonscription de ville nouvelle qui compte 21 groupes scolaires primaires répartis sur quatre communes. Le RASED est constitué par quatre psychologues, deux maîtres G et six maîtres E (le dispositif AIS de la circonscription est complété par un secrétariat de CCPE, deux classes fermées ex-perfectionnement et une CLIS 1).

Le maître d’accueil temporaire (désormais, MAT) qui me reçoit intervient sur quatre groupes scolaires primaires (11 classes maternelles, 21 classes élémentaires), “à cheval” sur deux sous-réseaux, associant un autre maître E, un maître G et deux psychologues.

Les deux maîtres E ont convenu de la répartition suivante : pour deux des écoles sur les quatre, intervention en cycle II sur une école et en cycle III sur l’autre et vice-versa. Les impératifs horaires du stage (mardi après-midi et vendredi matin) et la prise en compte de cette organisation conduisent à limiter mon intervention, pour le 1er trimestre, sur les cycles II de l’une des écoles.

Dans cette école, le MAT assure, depuis le début de l’année, des “ateliers langage” en cycle II maternelle (prévention primaire). Aucune demande de prise en charge n’émane des trois classes primaires de cycle II (trois CP/CE1) dans le cadre de petits groupes de remédiation. Par ailleurs, deux de ces trois classes sont co-animées par deux adultes (celle de la directrice, demi-déchargée, et celle du CP accompagné par une aide-éducatrice).

J’en viens à proposer une action de prévention primaire (puisque ne répondant pas à des difficultés spécifiques signalées) en direction des élèves de CP du 3ème CP/CE1, concernant l’entrée dans l’écrit, et dont la collègue se saisit.

3. Le projet

a – Sa définition

Pour les enfants de CP, entrer dans l’écrit, c’est apprendre à lire, alors qu’en maternelle leur approche est plutôt graphique et qu’au CE1, souvent, « apprendre à lire, c’est pour savoir écrire ».

La proposition faite ici a pour objectif d’examiner dans quelle mesure l’écriture approchée(14) (essayée, provisoire, spontanée, inventée, productive vs reproductive - selon les auteurs), en ce qu’elle révèle des conceptions de (sur) l’écrit, permet aux élèves une entrée plus aisée dans la culture de l’écrit(15).

C’est sur cette base qu’est définie mon intervention par communication de mon projet à la collègue, à défaut d’avoir pu être négocié ou co-construit. Les temps d’observation en classe, en effet, ont été “squeezés” : alors que je venais observer les élèves dans la classe (après en avoir informé l’enseignante), j’ai été sollicité pour les “prendre” (= les sortir de la classe) ; j’ai accepté pour ne pas me “couper” de la collègue (ou par incapacité à différer/dire “stop” ?).

b – Son cadre théorique

Je n’ai pas, en tant que maître E, à me substituer au maître de la classe. Les actions de prévention proposées doivent être menées en concertation avec lui (voir les circulaires de 1990 et de 2002 déjà citées). Dans la mesure où je n’ai pas su me donner les moyens d’une véritable concertation avant action, les activités doivent pouvoir être, à la fois, fondées théoriquement et non susceptibles d’entrer en opposition avec les pratiques quotidiennes.

Le cadre théorique m’est fourni par les travaux d’Emilia Ferreiro, relayés en France par les équipes de Jean-Marie Besse(16) à Lyon et de Jacques Fijalkow(17) à Toulouse. Trois ouvrages fondamentaux d’Emilia Ferreiro sont disponibles en France(18). Tous essaient de répondre à la question « Comment les enfants s’approprient-ils l’écrit ? » dans une perspective piagétienne et ils le font en articulant les deux points suivants :

Les conceptualisations de l’enfant sur l’écrit évoluent sur trois périodes :

Pour Ferreiro, cette évolution est, de plus, proprement conceptuelle, non pas seulement technique : « [cet apprentissage] consiste à construire un nouvel objet de connaissance et, pour ce faire, à reconstruire les opérations qui ont permis d’engendrer l’objet socialement constitué (ce qui ne veut pas dire, bien entendu, re-construire la suite historique des inventions) »(20).

Emilia Ferreiro se garde bien de faire de son travail de recherche des propositions pédagogiques. Elle souligne cependant que du choix qui est fait de privilégier « l’écriture, comme un codage, un moyen de transcrire des unités sonores en unités graphiques »(21) et d’analyser les difficultés d’apprentissage selon les mêmes présuppositions, d’une part, ou de concevoir « ce même apprentissage comme le mode de construction d’un système de représentation »(22) d’autre part, dépend la mise en œuvre d’une pratique quotidienne de lecture-écriture bien différente selon le cas.

c – Son contexte

Je propose d’intervenir auprès des CP de ce double niveau CP/CE1 (10 CP, 12 CE1). L’une des élèves de CP étant associée aux CE1 pour toutes les activités de lecture-écriture n’intégrera pas le groupe ; par contre, Guillaume qui, inscrit en CE1, est associé aux CP pour ces mêmes activités, en fera partie. Les âges des enfants s’échelonnent alors de 6;3 ans à 7;10 ans.

Je conduis treize séances : trois consacrées à une évaluation diagnostique aussi fine que possible concernant l’entrée dans l’écrit et la conceptualisation de l’écrit, neuf au déroulement du projet lui-même et une de retour en classe. Les séances durent une heure, en début d’après-midi le mardi et en début de matinée le vendredi. La première a lieu dans la classe elle-même (en l’absence des CE1, en BCD avec l’enseignante), les autres dans la salle du maître E, salle de classe affectée à l’usage alterné du maître E et du maître G.

d – L’évaluation diagnostique(23)

Elle revêt deux formes : une épreuve d’écriture inventée(24) et une série d’épreuves de clarté cognitive(25).

Il n’y a pas congruence exacte entre les deux types de résultats : ainsi Roumina, qui en est très nettement au stade de l’écriture alphabétique, peine à distinguer majuscule/minuscule, 1ère lettre/dernière lettre d’un mot et à repérer spatialement une phrase ; à l’inverse, Morgane, qui semble encore ne percevoir que les aspects quantitatifs de l’écrit, maîtrise, exceptée la majuscule, l’ensemble des méta-connaissances sur l’écrit (voir les résultats en annexe).

Ces évaluations faites, et qui ont donné aux enfants l’occasion d’oser écrire, me conduisent à mettre en œuvre un projet de production d’écrit, à partir d’un album sans texte.

e – Les moyens

f – L’attitude des élèves

g – L’évaluation de l’action

Au-delà de la production par tous les élèves, exceptée Fortuna, d’un petit livret regroupant de trois à cinq histoires (dont une totalement inventée, texte et illustration), une première manière d’interroger l’action mise en place est de la référer aux objectifs spécifiques définis lors de la construction du projet. Il s’agit d’une évaluation congruente à l’action : 

oser écrire : à terme, tous les élèves y sont parvenus, même Clément qui est resté longtemps enfermé dans une attitude de crainte par rapport à la tâche (« Je vais pas y arriver ») ou Morgane qui a dû “lutter” pour surmonter un déterminant de la tâche qu’elle s’était fixée à elle-même (« Je sais pas écrire sans faute ») ; pour la maîtresse, d’ailleurs, cet objectif n’en était pas un :

10. [...] il te semble qu’ils s’autorisent à écrire ou est-ce que tu as le sentiment qu’ils ont perçu des choses sur le fonctionnement de la langue ?
11. Non, ils ont perçu des choses sur le fonctionnement de la langue parce que tous s’autorisaient à écrire.
12. Déjà avant ?
13. Déjà avant. Alors, quand je dis s’autorisaient à écrire, c’est-à-dire à produire et n’étaient pas dans « je ne sais pas le faire » ou « je ne sais pas comment [la voix insiste] le faire », de toute manière, ils produisaient tous quelque chose. Ils se bloquaient pas, ils y allaient.(34)

diversifier le recours aux outils d’aide : il s’agissait pour moi, par la mise en commun des stratégies de chacun et, éventuellement, par mon apport de scripteur expert, de permettre aux élèves d’entrer dans un rapport flexible à l’écrit, afin d’éviter que ne s’installent des procédures privilégiées systématiques et univoques ; je m’appuyais pour cela sur la mutualisation des pratiques de chacun, sur l’incitation à l’auto-contrôle par changement de procédure et sur la théâtralisation de procédures expertes ; s’il est difficile d’avoir une évaluation fine de cette flexibilité, il semble cependant que la maîtresse a pu percevoir des modifications significatives.

aider à améliorer la clarté cognitive : la mise à distance de la langue que l’on est capable de faire est prédictive de la capacité que l’on a à un accès plus aisé au lire-écrire(35) ; m’appuyant sur les compétences généralement correctement installées des dix élèves (voir les résultats à l’évaluation diagnostique), je souhaitais que le vocabulaire technique de l’écrit devienne un véritable outil au service de l’entrée dans l’écrit ; le retour de la maîtresse semble aller dans ce sens :

16. Tu as eu le sentiment qu’ils avaient une meilleure approche de cette notion un peu difficile qu’est le mot, ...
17. ... oui, le mot en général...
18. ... qui n’existe que parce qu’on passe à l’écrit, parce qu’à l’oral, y’a pas de mot.
19. Notamment, je peux te donner les noms, il y a eu Marie et le petit Clément, et Morgane la grande, tu vois, et ça c’était net et qui, du coup, évidemment, après, dans des structures d’écrit, dans des productions d’écrit passant au sens, tous ces types d’enfants-là avaient la notion de phrase. [...] mais j’ai construit quelque chose que je peux relire, que quelqu’un peut comprendre, que je peux comprendre, que je peux faire comprendre aux autres, ça y’en avait pour qui c’était une succession de mots. [...] Là, ils étaient dans la recherche et, d’eux-mêmes, si je pointais, « relis-moi ce que tu as écrit », « est-ce que ça veut dire quelque chose », « non », et ils étaient capables de déplacer les étiquettes. Ça c’est net. C’est du positif.(36)

Au-delà du dispositif mis en place et des actions conduites, l’évaluation systémique me semblait essentielle. À cet égard, je n’ai pas pu me défaire d’un malaise certain dû au hiatus que je ressentais entre mon souhait de faire de ce projet un lieu de co-élaboration avec l’enseignante - fidèle en cela aux prescriptions institutionnelles et à ma conception d’une de mes missions - et l’incapacité dans laquelle je me suis trouvé de poser comme essentiel cet aspect de mon intervention.

Sans doute est-ce ce malaise qui est à la source de l’interrogation dont ce mémoire est porteur, qui vise à montrer que la prévention, non seulement rend possible la co-élaboration d’outils, mais encore en est le lieu pour ainsi dire “naturel”.

 

2ème partie – La prévention : un espace ouvert, lieu d’une co-construction possible entre le maître "ordinaire"et le maître E

Mes outils d’investigations

La mission de prévention, si elle est d’ancienne prescription institutionnelle, semble toujours dérouter les différents professionnels de l’école.

J’ai essayé de me donner quelques moyens de mieux cerner ce qui peut faire obstacle à une pratique effective, et somme toute ordinaire, d’actions en amont de la difficulté scolaire et ce qui, par ailleurs, peut relever de conditions facilitantes à une telle mise en œuvre.

J’ai choisi pour cela une démarche de questionnaires et d’entretiens dont j’expose ici les grandes lignes.

1. Questionnaires auprès de collègues stagiaires

Comme indiqué plus haut, le stage de pratique accompagné en RASED, propre à la formation, commande la mise en place d’une action de prévention au cours de l’année. Mes collègues stagiaires avaient donc eux aussi à concevoir un tel dispositif. Au moment où ce texte est écrit, sept d’entre eux ont pu s’essayer à un bilan des actions entreprises et ont eu la gentillesse de répondre au questionnaire que je leur ai adressé (voir le questionnaire en annexe).

Les champs d’intervention sont particulièrement ciblés : dans six cas sur sept, il s’agit de répondre aux demandes des enseignants de CE2 à la suite des évaluations de début d’année et de la mise en place des PPAP(37). L’autre champ d’intervention, mis en œuvre par une stagiaire comme parfois mis en place par les MAT, c’est celui des ateliers (principalement “langage”) en maternelle, ce qui semble d’usage plus avéré(38).

Les cadres généraux définis par les projets d’école et les volets AIS des projets de circonscription, selon les cas, intègrent ou non la prévention :

Ce qui apparaît comme premier, c’est la difficulté à penser la prévention en termes d’actions. Cela renvoie, me semble-t-il, à différentes interprétations :

Cette difficulté s’exprime conjointement avec l’intérêt ressenti par les collègues pour cette pratique qui apparaît comme « une notion nouvelle », autant pour les MAT spécialisés qui accueillent les stagiaires que pour les collègues des équipes d’école. Selon le lieu d’où ils s’expriment, cette nouveauté est vécue de manière positive par les enseignants qui soulignent :

Pour ce qui est des stagiaires E, qui ont eu la responsabilité de conduire ces actions de prévention, les réactions sont plus mitigées :

 

2. Entretien avec l’IEN de la circonscription

Deux actions ont été privilégiées pour l’année en cours par l’équipe élargie de circonscription :

J’ai rencontré l’IEN de la circonscription fin janvier, alors que mon intervention auprès des CP de la classe était terminée. Cette rencontre très informelle d’une bonne heure a été le lieu d’un exercice tout à fait intéressant de co-réflexion, l’IEN ayant très à cœur la prise en compte de la difficulté scolaire comme l’indiquent les actions entreprises sur sa circonscription, et jouant le jeu d’une réflexion en train de s’élaborer. Je ne lui avais pas fait parvenir de questionnaire préalable, mais j’avais prévu un certain nombre de points à aborder et des questions de relance éventuelle (voir le document en annexe).

Dès le début de l’entretien, l’IEN indique qu’il n’y a pas eu de réflexion sur l’idée de prévention :

1. Dès que je suis arrivée, j’ai... comment dire... je me suis inscrite disons en opposition à des approches morcelées des aides spécialisées, c’est-à-dire qui ne viseraient par exemple que le cycle II, voilà, avant même que les textes de 2002 soient sortis, ça m’a toujours paru une aberration, donc voilà, mais sinon il n’y a pas eu dans la circonscription un gros effort de réflexion théorique, etc. sur l’aspect prévention, ni en termes de, comment dire, de fonctionnement, de procédures, etc., on n’a pas, c’est d’ailleurs quelque chose qu’il faudrait faire.

Tout l’entretien montrera que le souci d’un travail en amont est pourtant premier et qu’il irrigue l’ensemble de sa réflexion.

Les points que l’IEN souhaite défendre s’organisent autour de quelques fondamentaux :

la difficulté est inhérente au processus même de l’apprentissage :

117. [...] il y a des élèves qui sont en difficulté en ce moment, c’est pas un élève en difficulté pour toute la vie. Enfin, il faudrait qu’on...
118. On peut parler de situation de difficulté comme on peut parler de situation de handicap ?
119. Exactement.

la difficulté nécessite de se centrer sur les besoins et de sortir des catégorisations :

23. Des besoins. Sans centrer sur la difficulté. Les besoins, parce que avant que ça devienne de la difficulté, il y a des besoins !
25. Et puis il faudrait qu’on arrive à sortir des catégorisations “élève en difficulté/élève pas en difficulté, élève handicapé/élève pas handicapé” heu... voilà donc, des besoins mais c’est pas toujours facile à identifier.
32. Répondre aux besoins particuliers, c’est pas seulement besoins en termes de difficultés d’apprentissage, c’est répondre aux élèves là où ils sont en fonction des...
33. Voilà, exactement !
34. Des ressources mises à jour.

– la difficulté nécessite d’utiliser toutes les possibilités d’organisation et de “prise en charge” :

1. [...] on ne doit, à mes yeux, n’exclure a priori aucune école des aides spécialisées même si l’écueil c’est d’avoir un travail un peu trop éparpillé donc, voilà. [...] on se dirige vers quelque chose qui serait, un travail beaucoup plus sur la diversification des modalités d’intervention des enseignants spécialisés que vers quelque chose de purement quantitatif. Autrement dit, les modes d’intervention, on a toute une palette et c’est là-dessus qu’il faut jouer par rapport aux besoins globaux des écoles.

– « La réponse [à la difficulté] doit être de moins en moins systématiquement la prise en charge au sens traditionnel avec sortie de classe » mais être dans la souplesse :

11. [...] il faut voir comment l’ensemble des aides s’articulent autour de cet enfant pour former un ensemble cohérent, qui va dans le même sens. Aller dans le même sens, ça veut pas dire forcément faire la même chose, ça veut dire se compléter d’une façon qui est pensée par l’équipe ! [...] Bien entendu, il faut qu’on sorte du “ou... ou...” c’est-à-dire “ou il relève du maître de la classe ou il relève du réseau”, ça c’est complètement aberrant !

– la prise en compte de la difficulté assigne à chacun un rôle qui lui est propre sans être figé :

au niveau du maître “ordinaire” :
11. [...] les circulaires de 2002 fournissent un excellent appui pour ça et on n’aurait pas dû même les attendre, c’est vraiment le maître de la classe qui est responsable avant tout de l’aide à apporter à l’enfant.

au niveau du maître E :
65. [...] si le maître est spécialisé, c’est pas pour devenir simplement un maître de plus dans l’école, sinon c’est pas la peine, bon y’a quelque chose qui est tout à fait paradoxal mais... c’est pas juste un qui parmi les autres a obtenu une spécialisation et puis voilà...

au niveau du conseiller pédagogique :
67. [...] c’est quelle différence entre le maître E en position de d’aide à l’expert, d’aidant à l’ajustement des conditions et puis le conseiller pédagogique ?
68.
Vous la situez comment cette différence justement ?
69. En termes de point d’interrogation, c’est-à-dire, je vous disais, j’ai pas une réponse type, je pense que c’est dans la triangulation que se situe la réponse. Autrement dit, le conseiller pédagogique est aussi une des ressources.

L’entrée de l’IEN, à propos de la difficulté scolaire, est proprement systémique (voir plus loin) : l’école est conçue comme un ensemble d’éléments en interaction dynamique, si bien que la modification de l’un d’eux concerne tous les autres et rend le système entier différent de ce qu’il était auparavant. Elle se situe en permanence, pour chacun des partenaires à trois niveaux : celui du savoir professionnel de chacun, celui de la spécificité des pratiques et celui du croisement des regards.

 

3. Entretien(40) avec la collègue du CP/CE1

J’ai rencontré la collègue de la classe sur laquelle je suis intervenu mi-janvier, après que l’action a été achevée. Cet entretien de presqu’une heure s’est déroulé dans un climat de confiance et d’écoute qu’il convient de souligner. Il avait été précédé de l’envoi d’extraits de la circulaire 2002-113 concernant la prévention et d’un questionnaire (voir en annexe). La collègue avait noté quelques réponses rapides à ce dernier pour ne pas oublier les points qu’elle jugeait importants d’aborder.

Une manière commode de relire cet entretien est de regrouper les éléments qu’elle exprime concernant le rôle du maître E et de son action en négatif et en positif.

Des éléments négatifs

– le “grief” le plus présent est celui concernant l’écart entre une pratique de classe ordinaire et ce qui est perçu du travail du maître E :

71. Pour moi, c’est trop en décalage, c’est trop spécifique.
83. [...] j’ai le sentiment que les postes E perdent de vue les objectifs malgré tout à atteindre en fin de CP, en fin de CE1 et pareil pour les autres classes. Et donc j’ai le sentiment effectivement qu’on perd, quand on n’est plus dans un groupe classe en tant que poste E, on perd la globalité de la classe.
127. [...] Si c’est vraiment purement ça, des problèmes d’apprentissage, je pense que c’est une perte totale
[détache les syllabes] de ce qu’on peut demander dans une classe d’un enfant de tel âge à un temps t.

– une conséquence logique de cette appréciation négative concerne l’absence de lien entre le temps de la classe et le temps de la prise en charge habituelle du maître E :

71. [...] Si tu veux, moi-même je n’arrive pas à faire les liens de ce qui se passe dans le E et ce qui peut être réinvesti dans la classe.
73. Alors un, j’ai peu de retour et euh... Alors j’ai peu de retour à deux niveaux : au niveau des enfants et au niveau de l’adulte. Deuxièmement, il ne nous a jamais été explicité réellement ce qui se faisait au sein des groupes, [...] et l’enfant est incapable de me le dire. [...] Ça me dérange parce que je me dis et l’enfant dans tout ça, comment il fait cette passerelle
[grand geste ample de la main, à mi hauteur, de la gauche vers la droite], entre ce qu’il fait en poste E...

– ces deux premiers points sont comme “exacerbés” par une forme de stigmatisation à laquelle conduirait la sortie de l’enfant de la classe :

41. [...] J’imagine que pour un gosse qui ne le dit peut-être pas mais n’a pas forcément envie de sortir de la classe, parce que ça quand même ils arrivent à le dire, « je n’aime pas », c’est pas « je n’aime pas être aidé », c’est qu’ils se sentent complètement exclus et coupés de ce qui se fait en classe [silence]. Et ça j’ai eu des enfants qui l’ont formulé. [...]
43. Ce groupe de 10, c’est moins stigmatisant. Même si effectivement au sein de la classe les enfants ne se montrent pas du doigt, [...] on en discute de tout ça, quand ils voient un enfant partir, les autres enfants savent pourquoi [...] Mais comment le vit l’enfant, t’en sais rien, malgré tout, ce qui se passe dans sa tête, t’es pas dans sa tête.

– cela conduit à une incompréhension forte du rôle du maître E et de sa “spécificité” :

77. Je n’arrive pas à... en fait, je n’arrive pas à percevoir, quand on sort les enfants, parce qu’il est rarement arrivé que ça se fasse dans la classe, je n’arrive pas à percevoir en quoi le maître E a un travail si spécifique. Pourquoi on appelle ça « aide pédagogique », pourquoi si tu dis « soutien » alors là c’est l’horreur, si tu dis euh... or moi, le maître E, il peut aussi être considéré pour donner un coup de pouce à un moment t à un môme. [silence]
89. [...] mais je me suis pas penchée sur le contenu propre d’un poste E. Mais si ce poste E a cette spécificité-là, c’est que forcément dans la manière d’aborder, pour moi il apporte un plus, que j’ai pas moi puisque j’ai pas eu la formation.
103. [...] à chaque fois, on est renvoyé « mais je ne fais pas du soutien, je ne fais pas ceci je ne fais pas cela, je suis une aide pédagogique ». Qu’est-ce que c’est ? Aide pédagogique, qu’est-ce que c’est ? Moi, j’ai pas vu.

Ce qui est remis en cause, ici, c’est un modèle de fonctionnement, sans doute issu des GAPP qui a perduré dans la mise en place des RASED, et qui consiste, pour le maître E, “à sortir” un petit groupe d’enfants de la classe pour mettre en œuvre des actions de remédiation, souvent définies sur le mode du “détour”(41).

Il semble pourtant que le malentendu maître “ordinaire”/maître E n’est pas insurmontable. La résolution du paradoxe apparent “pareil vs différent” est permise par la prise en compte de l’élève. Il est d’ailleurs intéressant de noter que, dans cette expérience-là, c’est l’enseignante qui prend en charge les élèves en difficulté de sa classe (les CE1) en me confiant les élèves qui ne le sont pas (les CP).

Ainsi des actions de prévention peuvent laisser apparaître :

Des éléments positifs

Ceux-ci, bien sûr, semblent comme “en décalque” des éléments négatifs pointés précédemment. Mais, par contraste, ils déterminent aussi des points de rencontre qui, travaillés, pourraient devenir des lieux de concertation réelle.

– L’action menée semble avoir permis de résoudre, pour partie, le problème de l’absence de lien, le difficile problème du transfert(42) :

9. [...] très vite après tes interventions, globalement, les enfants ont réinvesti ; moi j’ai senti le déclic, si tu veux, par rapport, pour certains enfants, à ce passage à l’écrit. [...] et, si tu veux, dans des situations similaires de production d’écrit, y’a des enfants chez qui ça [claque des doigts] j’ai senti une progression [silence] des déclics, c’est pas progression, ce sont des déclics.

– La prévention, au moins selon la modalité décrite ici, parce qu’elle est intervenue sur la totalité d’un groupe d’enfants de même niveau, a permis à la fois de soulager la gestion du double niveau et de faire avancer les CP sur les mêmes objectifs :

23 [...] le fait de l’avoir bossé, tous ensemble, et en petit groupe de 10, il est bien évident que, notamment en double niveau où le temps accordé sur ces moments-là pour les enfants qui ont du mal il est pas gigantesque, et là, le fait d’avoir ce temps-là, pour eux tout seuls, que les enfants de CP, je pense que ça a été très très positif.

  Cette approche appelle, comme naturellement, un travail commun de co-élaboration, co-animation, co-construction d’outils :

23. [...] moi une aide en tant que poste E que j’envisagerai si on les sort pas, si on les emmène pas ailleurs dans un autre lieu, que j’envisagerai tout à fait dans la classe en co-animation.
29. Si tu veux, au départ, quand au tout début, je pensais que si le travail du poste E n’était pas lié à ce qui était fait en classe, comme ce sont des enfants quand même qui ont des difficultés à faire des liens, alors pour moi les liens, ce qui est fait avec le poste E à pouvoir réinvestir, consciemment ou non, dans la classe, il me semblait qu’il était nécessaire qu’il y ait les mêmes supports. Or là, avec l’expérience, c’est la 1ère fois que ça se passe comme ça, je me suis mise à penser que le support n’était pas forcément essentiel mais que ce qui était essentiel c’est la démarche et
[voix insistante] les outils.

Ce que je comprends, dans cette relecture, c’est que des pistes sont ouvertes qui permettent à chacun des partenaires que sont le maître de la classe et le maître E de reconnaître l’autre, à la fois dans le rôle qui est traditionnellement le sien et dans un rôle nouveau, construit ensemble, qui fait de l’élève le sujet convergeant d’un intérêt commun et triangule une relation qui pourrait être d’opposition ou de revendication de territoires différents et permet de sortir d’une impasse.

 

3ème partie – La prévention : des outils pour construire un espace commun

A – Pour une approche systémique

1. Dans une approche linéaire, on considère qu’à un problème donné il y a une cause antécédente bien précise ; on est à la recherche d’une solution simple et immédiate. Dans le cas qui nous occupe des relations entre le maître E et le maître “ordinaire”, on voit bien ce que peut générer de difficultés (incompréhension, opposition, querelle de “territoires”) une telle approche.

On perçoit bien la nécessité d’introduire un élément tierce pour dépasser les possibles tensions.

2. L’approche systémique (ou circulaire) propose, lorsqu’un problème se pose, d’explorer son contexte afin d’identifier et de décrire les différents éléments du “système” dans lequel il s’inscrit, les relations entre ces éléments, les “boucles de rétroaction” et les mécanismes de régulation. Les mêmes conséquences peuvent avoir plusieurs causes et les mêmes causes peuvent avoir des effets différents. La solution est complexe et va dépendre de la capacité des acteurs à jouer sur plusieurs facteurs.

« Travailler en réseau conduit à dépasser le modèle mécaniste de l’organisation en contextualisant le travail, à dépasser aussi “le culte moderne de l’expert”, de l’individu qui possède une connaissance approfondie sur des fragments d’information ou d’expérience mais qui reste ignorant de l’ensemble dont il fait partie »(43).

Cela nécessite la prise en compte d’un certain nombre d’éléments(44) :


Pour tenter une synthèse :

Approche analytique Approche systémique
Isole : se concentre sur les éléments. Relie : se concentre sur les interactions entre les éléments.
Considère la nature des interactions. Considère les effets des interactions.
S’appuie sur la précision des détails. S’appuie sur la perception globale.
Modifie une variable à la fois. Modifie des groupes de variables simultanément.
Indépendante de la durée : les phénomènes considérés sont réversibles. Intègre la durée et l’irréversibilité.
La validation des faits se réalise par la preuve expérimentale dans le cadre d’une théorie. La validation des faits se réalise par comparaison du fonctionnement du modèle avec la réalité.
Modèles précis et détaillés, mais difficilement utilisables dans l’action. Modèles insuffisamment rigoureux pour servir de base de connaissances, mais utilisables dans la décision et l’action.
Approche efficace lorsque les interactions sont linéaires et faibles. Approche efficace lorsque les interactions sont non linéaires et fortes.
Conduit à un enseignement par discipline. Conduit à un enseignement pluridisciplinaire.
Conduit à une action programmée en détail. Conduit à une action par objectifs.
Connaissance des détails, buts mal définis. Connaissance des buts, détails flous.

 

B – Les obstacles

L’approche systémique et la prévention peuvent apparaître comme des modèles contradictoires.

1. Le champ sémantique de la prévention est parasité par son histoire même, son emprunt à un autre champ que celui de l’éducation et les difficultés inhérentes à ce changement de contexte, d’une part, et par la double connotation dont il est porteur, positive (“être prévoyant”) et négative (“être prévenu contre quelqu’un ou quelque chose”, “être prévenu dans une affaire judiciaire”), d’autre part. La nécessité d’un accord minimal sur le sens du terme apparaît pour que celui-ci ne fasse pas obstacle, n’instaure pas de limites, ne pose pas comme leurre l’espace commun que l’on cherche à créer(48).

2. La question du temps semble centrale à tous les acteurs : à l’enseignant qui souhaite des réponses immédiates à ses interrogations concrètes et est pris dans le présent de l’action, à l’enseignant spécialisé qui veut installer le retour sur l’apprentissage dans la durée, à l’IEN qui reconnaît qu’une co-élaboration demande un temps commun que les acteurs de terrain n’ont pas suffisamment. Au-delà, « la prévention s’organise plus ou moins dans la linéarité du temps. Il y a un avant, un maintenant et un futur [...] dont on veut se prévenir ou mieux encore que l’on veut éviter. [...] La systémique est un modèle qui fait un autre usage du temps. Elle semble vouée à n’exister que dans et par une pratique présente. Les événements y sont présentés comme concomitants et interagissent de façon circulaire »(49).

3. La prévention a partie liée à la prédiction(50) ou à la prévoyance : on prévoit l’installation possible (probable) d’une difficulté, on met en place une action préventive pour empêcher que cette difficulté surgisse ou s’installe. Ce faisant, on risque le danger d’une prédiction “auto-référencée”, c’est-à-dire un événement qui se réalise par le fait même qu’on cherche à l’éviter : c’est le cas, par exemple, du petit groupe de remédiation constitué d’élèves que l’on “sort” de la classe, avec lesquels le maître E “avance” de manière positive alors que, dans le même temps, le maître de la classe, “libéré” de l’attention due aux “moins avancés”, avance lui aussi plus vite - et l’écart dont il s’agissait de prévenir l’amplification s’accroît tout de même.

 

C – Les éléments facilitateurs

1. Comme des pré-requis

a – La centration sur l’élève : même si un travail d’écoute de l’enseignant est nécessaire (voir plus bas), le souci premier du maître E, c’est l’élève. Ce sont les compétences de ce dernier qui sont visées pas celles du maître, même si la relation nouvelle qui s’instaure est source de changement pour chacun, dans une première triangulation où se retrouvent élève, maître de la classe et maître E.

b – Une temporalité concertée : si le travail du maître E porte sur le long terme, celui du maître de la classe est pris dans l’immédiateté de la gestion quotidienne. À la demande d’attente de l’un répond, comme un écho inquiet, le besoin de solutions rapides de l’autre. Construire un espace commun, c’est sans doute d’abord installer celui-ci dans une double temporalité explicitée puis négociée en prenant conscience que le temps de l’enseignement et celui de l’apprentissage ne sont pas justement superposables.

c – Le travail de la demande : le maître E travaille habituellement à partir d’une demande(51). Même s’il se donne les moyens d’affiner celle-ci par un temps plus ou moins long d’observation et d’aider le maître à faire une analyse plus précise des besoins de ses élèves, l’action qu’il propose se doit d’être une réponse à cette demande. Même différée, même différenciée, cette réponse n’en demeure pas moins devoir être effective.

d – De la parole à l’action : dans une action de prévention co-construite, les rencontres entre le maître “ordinaire” et le maître spécialisé sont régulières et s’organisent autour d’une problématique commune. Il y a le temps de la parole, mais aussi celui de l’action(52) où l’égalité de positionnement « le nez dans le guidon »(53) autorise les tâtonnements, met les erreurs en perspective, modifie le contexte de la classe et des relations multiples qui y sont à l’œuvre : la co-gestion permet l’inter-action.

e – Un positionnement d’expertise partagée : la relation qui s’instaure dans l’action de prévention, en positionnant chacun dans le domaine d’expertise qui est le sien, permet que chacun reconnaisse en l’autre ses capacités d’autonomie et de responsabilité, et ses compétences professionnelles. La demande du maître de la classe ne l’assujettit pas au maître E, ni ne lui impose d’abdiquer son autonomie. Et, dans le même temps qu’elle pose une co-responsabilité par rapport à l’élève, elle explicite aux yeux de l’autre l’expertise de chacun : le maître est celui qui connaît le mieux sa classe, le seul qui puisse adapter et réguler le quotidien en mobilisant les schèmes construits par l’expérience(54) ; le maître E est celui qui, par la finesse des informations prises, peut faire retour sur les modalités d’apprentissage des élèves et faire de celles-ci le point d’ancrage d’une deuxième triangulation qui permet le face-à-face.

2. Vers la modélisation(55) d’une démarche(56)

a – Recherche d’une cogestion de l’action : au moment de la demande, l’enseignant se trouve « dans une position périphérique par rapport à sa classe et dans une position où [il] n’assume plus pleinement la fonction de pilotage(57) »(58) puisqu’il accepte de partager cette dernière avec le maître E qui se trouve alors en position de co-pilotage. Ce partage est rendu possible si le maître E accepte, dans un 1er temps, la demande telle qu’elle s’exprime et propose au maître “ordinaire” d’en retravailler les termes. Corollaire de cette position est la nécessité d’entendre la demande sans la pondérer pour éviter qu’à la banalisation proposée par le maître E réponde une escalade symétrique de la part du maître de la classe.

C’est l’acceptation de la vision du demandeur qui va permettre que s’instaure la coopération. Il ne s’agit pas ici de manipulation mais l’application dans un contexte inhabituel de techniques proposées ailleurs par Erickson(59) et se trouvant aussi mise à l’œuvre lors d’entretiens d’explicitation(60).

L’accompagnement est premier pour tenter de lever les difficultés que peut éprouver le maître de la classe à se retrouver dans une position qui n’est pas habituellement la sienne et à accepter un regard potentiellement doublement “inquisiteur”, pour le moins différent : sur lui-même, sur ses élèves.

b – Récolte d’informations : le maître E est reconnu avoir une compétence particulière dans le domaine de l’observation de l’élève en situation d’apprentissage(61). Cette “expertise” ne vaut que si elle est médiatisée, partagée, restituée.

c – Restitution des informations : la découverte de son groupe-classe par le regard de l’autre, dans un 1er temps, peut être un “choc” pour l’enseignant. Il s’agit pour le maître E d’œuvrer pour montrer que ce regard autre, singulier, différent donc, loin de rendre caduques ou infondés les ressentis du maître, les conforte ou pour le moins les éclaire d’une manière nouvelle qui va permettre de reconsidérer les modalités de l’apprentissage, les interactions entre les élèves et son propre rôle d’animateur du groupe.

d – Des modifications rendues possibles : en sortant de la linéarité d’une organisation vécue sur le mode descendant, le maître peut se repositionner comme pilote responsable de la conduite de sa classe, comme élément du système formé par celle-ci. Dans le même temps, le maître E peut “lâcher” peu à peu son rôle de co-pilote et restaurer le maître dans la plénitude de son rôle. Les élèves, enfin, par le croisement des regards ont pu installer un rapport varié aux apprentissages. La classe redevient l’espace privilégié de la place de chacun, reconnu dans sa singularité.

 

Conclusion

La mission de prévention assignée à l’école et à ses acteurs, pour relativement ancienne qu’elle soit, n’apparaît pas encore d’une grande clarté ni d’application aisée. Sans doute cela a-t-il à voir avec la contamination qu’elle subit des champs conceptuels dont elle est issue, ceux du social, du judiciaire et du médical. L’importation d’un concept d’un champ d’application dans un autre, en effet, n’est jamais ni simple ni totalement transparent.

Dans le cadre de l’éducation, cette mission peut par ailleurs apparaître comme étant une injonction paradoxale : dans le même temps où il est demandé à l’école qu’elle assure sa mission d’apprendre, il lui est signifié que, si elle échoue, il lui reviendra de mettre en place les moyens de pallier cet échec. Et à prévenir celui-ci, il est fort possible que l’on contribue à le renforcer...

Alors, mission impossible que celle de prévention ? Je ne le crois pas, et pour plusieurs raisons que j’ai essayé de développer.

Travaillant dans des temps différents, l’enseignant “ordinaire” et le maître E ont tout à gagner, et surtout les élèves dont ils ont la charge, à définir ensemble un espace commun :

Enseignant spécialisé, le maître E se voit attribuer deux missions spécifiques de prévention et de remédiation(62). « Chargé des aides à dominante pédagogique », il exerce dans le cadre de l’adaptation et de l’intégration et est doté d’une mission particulière de relation(63).

Ce cadre institutionnel permet une grande souplesse dans les interventions : certaines réfèrent à la mission d’enseignant (prévention primaire : « aide à l’enseignant pour une aide à l’élève » ; prévention secondaire : « soutien »), d’autres renvoient à la mission d’enseignant spécialisé (prévention secondaire : « mise en place d’une médiation adaptée » ; « mise en place d’une remédiation individualisée »).

Ces interventions, certes, prendront des formes différentes(64) :

La “spécificité” du maître spécialisé sera vécue dans le type d’accompagnement mis en œuvre :

Mais ce que permet surtout la mission de prévention, c’est de sortir du “ou... ou...”, “ou le maître de la classe... ou le maître E”, en ce qu’elle suppose une modification des pratiques et des modalités de collaboration des enseignants. La difficulté scolaire est le catalyseur de cette modification ; la modification est le point de départ et/ou la conséquence du dispositif. La difficulté de l’élève n’est pas d’abord traitée “à part”, celui-ci reste membre de la communauté de la classe.

Ce sont des besoins auxquels on essaie alors de répondre, et non pas seulement des difficultés auxquelles il s’agit de porter remède...

 
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Bibliographie

A – Textes émanant de l’institution

 

B – Travaux théoriques

Autour de l’entrée dans l’écrit

Autour de l’entrée systémique

À propos de l’entretien

À propos de la prévention

À propos du transfert

Divers

 
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Annexes

Annexe 1 : épreuves reprises de l’EURED-IREDU

Écriture inventée

Le texte dicté est le suivant :

RAT
CHEVAL
PAPILLON
CROCODILE
LE RAT MANGE DU FROMAGE

Les productions écrites obtenues à partir des dictées faites aux enfants ont été analysées à partir d’une grille prenant en compte 12 critères :

Page : Est-ce que l’apprenant sait utiliser une page ?
Lettre : Est-ce que l’apprenant sait que, pour écrire, il faut utiliser des lettres ?
Mot : Est-ce que l’apprenant sait que pour écrire un mot il faut utiliser plusieurs lettres ?
Phono-graphie phrase : Est-ce que l’apprenant sait que la phrase plus longue à énoncer est aussi plus longue à écrire ?
Phrase segmentée : Est-ce que l’apprenant sait que la phrase est composée de mots et qu’elle est segmentée ?
Code conventionnel : Est-ce que l’apprenant sait qu’il existe un code phonographique conventionnel ?
Permanence du mot : Est-ce que l’apprenant sait que le mot a une graphie généralement constante ?
Taille du mot : Est-ce que l’apprenant sait que le mot le plus long à énoncer est celui dont la graphie est la plus longue ?
Structure du mot : Est-ce que l’apprenant sait que le mot a une structure syllabique ?
Attaque du mot : Est-ce que l’apprenant sait prendre appui sur le début du mot pour produire sa graphie ?
Voyelles : Est-ce que l’apprenant sait utiliser les voyelles et les situer correctement ?
Consonnes : Est-ce que l’apprenant sait utiliser les consonnes et les situer correctement ?

 

Clarté cognitive

Chacun des élèves a un exemplaire du texte suivant sous les yeux :

La tarte aux pommes*

Julie arrive de l’école. Sa maman lui donne de la tarte aux pommes.
Puis Julie va au jardin. Le chat va avec elle et miaule pour avoir un peu de tarte. Mais Julie a tout mangé !

Jean Sairien

* texte emprunté aux tests de lecture du C.R.D.P. de Nantes

Je le lis à voix haute et leur demande d’entourer les éléments suivants de différentes couleurs : le titre en rouge, le nom de l’auteur en bleu, le texte en vert, une lettre en rouge, la première lettre en bleu, la dernière lettre en vert, un mot en rouge, le premier mot en bleu, le dernier mot en vert, une phrase en rouge, la première phrase en bleu, la dernière phrase en vert, une lettre majuscule en rouge, une lettre minuscule en bleu, le nom de la petite fille en vert, un point en rouge, un point d’exclamation en bleu, la première ligne en vert, la deuxième ligne en rouge et la dernière ligne en bleu.

 
*   *   *
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Annexe 2 : évaluations diagnostiques (résultats)

  Clarté cognitive Entrée dans l’écrit
1er mot Dernier mot Quantité d’écrit Segmen-tation Lettre Mot Minuscule Majuscule 1ères lettres Dernières lettres Phrase Titre Auteur Dernière ligne 1ère phrase Sur 15 Écritures
pré-linguistique segmentée phonique alphabétique
Guillaume
13/06/96
      2/3                       12 2/3        
Alexis
15/01/96
      3/3                       13        
Julien
04/03/97
      3/3                       13        
Roumina
15/08/97
      3/3                       8        
Sarah
24/12/96
      3/3                       11        
Fortuna
09/07/97
      2/3                       9 2/3        
Clément
23/05/97
      3/3                       12        
Melissa
26/03/97
      2/3                       9 2/3        
Morgane
21/01/97
      3/3                       14        
Marie
10/09/97
      2/3                       11 2/3        

Les cases grisées indiquent un élément que l’élève a su reconnaître

 
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Annexe 3 : questionnaire aux stagiaires

1 – Peux-tu décrire, en quelques mots, le dispositif de prévention que tu as mis en place (niveau(x) de classe, nombre d’enfants, objectifs généraux, supports, ...) ?

2 – Comment as-tu installé ton action auprès du (des) collègue(s) de la (des) classe(s) sur laquelle (lesquelles) tu es intervenu(e) ?

3 – L’idée de prévention était-elle pour lui (elle) inconnue, surprenante, incongrue, intéressante, ... ? De quelle manière ?

4 – Comment cette action de prévention s’est-elle inscrite dans la pratique globale habituelle de ton MAT ?

5 – Comment as-tu ressenti (ou analysé) l’attitude du MAT par rapport à la prévention (nouveauté, actions rodées, réticence, ...) ?

6 – As-tu pu évaluer le dispositif de prévention mis en place ? Quel retour as-tu eu du (des) maître(s) de la (des) classe(s) ?

7 – Existe-t-il, sur la circonscription sur laquelle tu interviens, un projet spécifique AIS ? Au sein de ce projet, existe-t-il un volet « prévention » ?

8 – Même question au niveau de l’école (projet d’école prenant en compte la difficulté scolaire, volet spécifique AIS, ...).

9 – De ce que tu as pu observer, la prévention est-elle l’“affaire” du seul maître E ou du RASED dans son ensemble ? Comment expliques-tu cela ?

10 – Cette pratique te semble-t-elle correspondre à l’image que tu t’étais construite d’une pratique de maître E ?

11 – Cette pratique te semble devoir occuper quelle place à l’avenir dans ta pratique professionnelle de maître E ?

12 – As-tu d’autres éléments d’information ou de réflexion que tu souhaiterais me faire partager ?

 
*   *   *
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Annexe 4 : entretien avec l’IEN

Motivation de cet entretien

L’évolution du rôle des RASED m’amène à faire porter mon sujet de mémoire non sur un travail de remédiation avec des enfants mais sur les relations et la complémentarité des maîtres des classes et des enseignants spécialisés.

Comment la notion de prévention interroge les missions de l’école et les interactions enseignants des classes /enseignants spécialisés ?

Comme on se situe sur un changement à peine amorcé et que vous semblez souhaiter l’accompagner par votre politique de circonscription, il m’a paru intéressant que vous me la présentiez en la resituant à la fois dans la commande départementale, académique et nationale et dans la réalité concrète du terrain.

Questions de relance

Actions de la circonscription

Quelles sont les actions que vous avez mises en place, ou que vous envisagez, et qui vous semblent susceptibles de faire évoluer la prise en compte de la difficulté à l’école ?

Quelles évolutions du RASED vous semblent souhaitables ?

Quelles sont les évolutions que vous souhaitez favoriser avec l’animation “mise en réseau des aides” ? En quoi consistera cette animation ? Comment l’avez-vous définie ?

Quel est le rôle d’une charte de réseau ? Vous avez souhaitez inscrire cette charte dans le projet de circonscription ?

Relations RASED-école

Lors de la réunion du RASED à laquelle j’ai assisté, vous avez parlé de « faire évoluer les cultures professionnelles des enseignants ». Comment, selon vous, les membres du RASED peuvent-ils contribuer à cette évolution ?

Les projets d’école prennent-ils en compte la difficulté scolaire ?

Les évaluations nationales et les PPAP ont-ils fait évoluer cette prise en compte ?

Quelle est la rôle des enseignants spécialisés dans les PPAP ?

Les relations école-RASED relèvent-elles d’un travail d’équipe, d’un partenariat, d’une mise en réseau ? Selon vous, le RASED est-il un réseau ?

Quels sont les souhaits des écoles qui remontent jusqu’à vous quant au travail avec le RASED ?

Aide au maître

Lorsque je vous ai croisée à l’école du V., vous m’avez laissé entendre qu’on était dans une phase de transition et que les maîtres E étaient en première ligne du changement. Qu’entendiez-vous par là ?

La travail des différents membres du RASED vous semble-t-il évoluer dans le même sens ?

Vous m’avez aussi parlé d’un rôle de conseil du maître E, comment l’entendez-vous ?

Que pourrait être une “aide aux maîtres pour une aide aux élèves” ? Vous la voyez plutôt en termes de diagnostic, d’intervention en classe, d’une aide à l’équipe ?

L’aide au maître concerne-t-elle davantage le maître E que les autres enseignants spécialisés ?

L’aide au maître vous semble-t-elle en mesure de favoriser une responsabilisation de l’ensemble de l’équipe vis à vis des élèves en difficulté ?

Personne-ressource

Le rapport Ferrier proposait que les membres du RASED ne soient pas considérés comme appartenant aux équipes pédagogiques mais comme des personnes-ressources placées auprès de l’IEN de circonscription. Qu’en pensez-vous ?

Pour vous, qu’est-ce qu’une personne-ressource ?

Quelles sont les personnes-ressources auxquelles le maître peut faire appel pour mieux répondre aux besoins d’élèves en difficulté ?

 
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Annexe 5 : questionnaire à la collègue de CP/CE1

Comment as-tu compris mon intervention auprès de tes élèves ?

As-tu le sentiment d’un effet positif (auprès des CP ; par rapport à ta gestion de la classe ; etc.) ?

As-tu le sentiment d’un effet négatif ?

Cette intervention correspond-elle à l’image que tu te fais du travail du maître E ?

Si oui, pourquoi ?

Si non, comment envisages-tu celui-ci ?

Qu’est-ce qui te paraît être spécifique du travail du maître E par rapport au travail du maître de la classe ?

Au cours d’une année scolaire, y a-t-il pour toi des moments privilégiés pour faire appel au maître E ?

Toi qui as connu le fonctionnement des GAPP, constates-tu des différences (de mission, de pratique) avec celui des RASED ?

De qui relève, dans l’école, le traitement de la difficulté scolaire d’un élève ?

 
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Annexe 6 : nature et spécificité de l’accompagnement par le maître E

Agnès Thabuy, Nature et spécificité de l’accompagnement par le maître E, formation CAPSAIS, document interne, 2004.

nature du dispositif nature de l’aide objectifs du dispositif quels enfants ? qu’est-ce qui est visé chez les enfants ? taille du groupe lieu de prise en charge projets élaborés par le maître E spécificités de l’accompagnement par le maître E enjeux des dispositifs
prévention primaire « aide aux aidants »
(aide aux enseignants d’abord, pour qu’ils aident mieux tous les enfants)
– amélioration du système éducatif pour tous les enfants
– aménagement des conditions d’enseignement dans la classe, dans le cycle
– aide à la mise en place d’une pédagogie différenciée
– co-construction d’outils d’évaluation, ou d’outils pédagogiques
– mutualisation des démarches
tous les enfants d’une classe ou d’un cycle
ou
aucun
– construction de repères
– utilisation d’outils de manière autonome
– éducation cognitive
– acquisition de compétence(s) pointue(s) dans le domaine des apprentissages instrumentaux
petit, moyen, grand → toute la classe
ou
aucun
dans ou hors la classe mention dans le projet de fonctionnement
PG si prise en charge d’un groupe
– reprise des supports de la classe ou introduction d’autres supports qui deviendront ceux de toute la classe
– co-intervention maître de la classe/maître E, même si ce n’est pas dans le même lieu ni sur la même tâche
– même type de tâche qu’en re-médiation
– même type de temps 3 que pour la prévention secondaire, même si le problème du transfert est moins prégnant
– pas d’individualisation possible
suppose une modification des pratiques et des modalités de collaboration des enseignants ; la difficulté scolaire est le catalyseur de cette modification ; la modification est le point de départ et/ou la conséquence du dispositif
secondaire soutien « coup de pouce » des élèves en difficultés légères et ponctuelles qui ont besoin de temps – acquisition de compétences déjà travaillées dans la classe par reprise, renforcement, répétition petit, moyen, grand
(1 → 15/16)
dans ou hors la classe mention dans le projet de fonctionnement – reprise des supports de la classe, avec les mêmes tâches et les mêmes consignes qui sont reformulées, réexpliquées
– co-intervention maître de la classe/maître E, même si ce n’est pas dans le même lieu
aide spécialisée mise en place d’une médiation adaptée des élèves en difficultés légères, pour lesquels on craint des difficultés plus importantes à venir – éducation cognitive
– acquisition de compétence(s) pointue(s) dans le domaine des apprentissages instrumentaux
petit, moyen (1 → 10/12) dans ou hors la classe PG
PPI éventuellement (si individualisation possible)
– même type de tâche que pour la re-médiation
– les 3 temps, même si dans le temps 3 le retour sur le vécu se fait pour quelques enfants et non tous les enfants (le problème du transfert se pose aussi : importance de dégager un (ou des) PDG)
– l’individualisation est parfois possible, parfois pas, tout dépend de la taille du groupe
remédiation aide spécialisée mise en place d’une re-médiation individualisée des élèves en difficultés importantes, qui ont déjà vécu une médiation (qui s’est avérée non fructueuse) concernant les compétences visées – re-médiation cognitive
– re-médiation visant l’acquisition de compétence(s) pointue(s) dans le domaine des apprentissages instrumentaux (nécessité de déconstruire avant de reconstruire)
petit (1 → 4/5) hors la classe PG et PPI – individualisation (évaluations individuelles fines, accès au fonctionnement cognitif de chacun, prévision des modes d’intervention adaptés à la singularité de chacun
– tâche(s) répétitive(s) épurée(s) (à complexité relative) et pourtant suffisamment complexes pour s’inscrire dans la classe des situations-problèmes
– les 3 temps et surtout un temps 3 structuré en : retour sur le vécu de chacun/dégager ce qui est à garder/envisager la manière de réutiliser la prochaine fois/envisager ce qui est généralisable pour le groupe, utilisable dans la classe (Þ PDG) : le problème du transfert est central
ne suppose pas vraiment de modification des pratiques des enseignants ; on est dans un « traitement à part » des difficultés

 
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Notes

(1) Ces citations renvoient à la circulaire n° 97-104, BOEN Spécial n° 3 du 8 mai 1997 : Formations préparant à l’examen pour l’obtention du CAPSAIS, habituellement appelée “Référentiels”.
(2) Dans tout ce travail, l’appellation “maître E” renverra, par commodité, à l’enseignant spécialisé chargé des aides à dominante pédagogique. De la même manière, le maître de la classe, non spécialisé, sera appelé maître “ordinaire”. Il n’y a là qu’un souci de clarification, pas de hiérarchisation, comme j’aurai l’occasion de le montrer.
(3) Circulaire n° IV-70-83 du 9 février 1970 : Prévention des inadaptations – Groupes d’aide psycho-pédagogique – Sections et classes d’adaptation.
(4) Circulaire n° 76-197 du 25 mai 1976 : La prévention des inadaptations et les groupes d’aide psychopédagogique.
(5) Circulaire n° 90-082 du 9 avril 1990 : Mise en place et organisation des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté.
(6) Circulaire n° 2002-113 du 30 avril 2002 : Les dispositifs de l’adaptation et de l’intégration scolaires dans le premier degré.
(7) Circulaire citée, BO n° 19 du 19/05/2002, p. 1272.
(8) Enseigner la lecture et prévenir les difficultés dans les CP à effectifs réduits ou à encadrement renforcé, MEN, 2004 (document complémentaire au livret : Lire au CP – Repérer les difficultés pour mieux agir, MEN-CNDP, 2003).
(9) L’idée de prévention dans l’Éducation nationale pourrait faire l’objet d’une approche historique et/ou sociologique. Tel n’est pas l’objet du présent travail. Je note seulement que les textes de 1970-1976 sur la prévention ont pour cadre historique le tournant des années soixante et la massification de l’enseignement et que l’un des initiateurs de ces textes, André Labregère, a développé le modèle de la prévention à des fins pédagogiques dès 1972. Voir J. Petit dir., Les enfants et les adolescents inadaptés et l’Éducation nationale – tome 1 : L’action psychopédagogique, 1972 et, particulièrement, l’article d’A. Labregère, « La prévention des handicaps et des inadaptations », pp. 119-129.
Par ailleurs, il serait sans doute intéressant de suivre l’évolution du paradigme, du tournant du XXème siècle à celui du XXIème, qui fait passer de l’idée de préservation (de l’enfance en danger) à celle de prévoyance, puis de celle de prévention à celle de (principe de) précaution – comme réponses institutionnelles successives à l’ajustement (au) social.
(10) Op. cit., p. 30.
(11) Op. cit., p. 10 (c’est moi qui souligne).
(12) Puisqu’elle n’est pas l’objet de ce travail, je précise que la remédiation « a pour objectif de favoriser la conquête d’acquisitions qui n’ont pu être faites dans les activités ordinaires d’enseignement, de reconstruire des représentations, des connaissances, etc. ». Circulaire citée, BO n° 19 du 19/05/2002, p. 1275.
(13) « Projet de formation au CAPSAIS option E, année 2003-2004 », document interne.
(14) Voir Jean-Marie Besse, « L’accès au principe phonographique : ce que montrent les écritures approchées », in Gérard Chauveau dir., Comprendre l’enfant apprenti lecteur, 2001 : « Nous appelons “écritures approchées” ce qui est qualifié, dans d’autres contextes, d’“écritures provisoires” ou “écritures inventées”. Par cette expression, nous entendons indiquer qu’il s’agit d’essais d’approche d’une véritable écriture - c’est-à-dire compréhensible par d’autres lecteurs -, mais que tous ces essais ne se ressemblent pas, ils correspondent même fréquemment à des modes d’approche distincts », p. 130.
(15) Jacques Bernardin, Comment les enfants entrent dans la culture écrite, 1997 (éd. 2002).
(16) Voir, par exemple, son introduction à Ferreiro 1982 (trad. 1988) et Jean-Marie Besse dir., Regarde comme j’écris !, 2000.
(17) Voir, par exemple, Jacques Fijalkow coord., Des enfants, des livres et des mots, Revue Internationale des Sciences de l’Éducation, n° 1, 1999.
(18) Emilia Ferreiro, Lire-Écrire à l’école : comment s’y apprennent-ils ?, 1982 (trad. 1988).
Emilia Ferreiro, L’écriture avant la lettre, recueil d’articles écrits entre 1982 et 2000 (trad. 2000).
Emilia Ferreiro, Culture écrite et éducation, 1999 (trad. 2002).
J’ai aussi utilisé le cédérom présentant les travaux d’Emilia Ferreiro, Los niños piensan sobre la escritura, 2003, particulièrement les 2ème et 3ème parties (“Los problemas que los niños se plantean” et “Para aprender a leer los textos de los niños”).
(19) Ferreiro, 2000, p. 16.
(20) Ferreiro, 2000, p. 61.
(21) Ferreiro, 2000, p. 63.
(22) Ferreiro, 2000, pp. 63-64.
(23) Circulaire n° 2003-110 du 10 juillet 2003 : Dispositif national d’évaluation diagnostique - année 2003-2004. Les évaluations diagnostiques « ont pour objectif premier de permettre l’observation des compétences et d’apprécier les réussites et les difficultés éventuelles de chaque élève considéré individuellement, à un moment précis de la scolarité. Elles fournissent aux enseignants des repères exploitables quant aux types d’erreurs fréquemment produites par les élèves au cours de leur apprentissage ».
(24) Voir note 14 p. 9.
(25) La théorie de la clarté cognitive a été proposée par John Downing en 1984, puis vulgarisée dans John Downing et Jacques Fijalkow, Lire et raisonner, 1984 (éd. 1990). « On peut résumer formellement la théorie de la clarté cognitive en huit postulats : [...] 3. le processus d’apprentissage de la lecture consiste en la redécouverte : a- des fonctions, b- des règles de codage du système d’écriture ; [...] 5. les enfants abordent les tâches de lecture à l’école avec des concepts relatifs aux fonctions et aux caractéristiques de l’oral et de l’écrit qui ne sont qu’en partie développés ; 6. dans des conditions convenables, la clarté cognitive des enfants quant aux fonctions et aux caractéristiques de la langue vont se développant ; 7. [...] des défis conceptuels demeurent, qui conduisent à un élargissement de la clarté cognitive lors des étapes scolaires ultérieures lorsque de nouveaux savoir-faire s’ajoutent au répertoire de l’élève ; [...] » (c’est moi qui souligne), op. cit., pp. 60-61.
(26) Épreuve développée à partir de celle proposée par Séverine Le Bastard et Bruno Suchaut pour l’IREDU-CNRS-Université de Bourgogne in Lecture-Écriture au cycle II : évaluation d’une démarche innovante, Cahiers de l’IREDU n° 61, 2000. Voir en annexe.
(27) Dans une perspective développementale, Gérard Chauveau distingue cinq niveaux d’entrée dans l’écrit : 1. traces ou simili-écriture, 2. écriture prélinguistique (ou grapho-perceptive), 3. écriture segmentée, 4. écriture phonique, 5. écriture (presque) alphabétique ; cf., par ex., Gérard Chauveau, Comment l’enfant devient lecteur, 1997, pp. 161-166 (éd. 2002).
(28) Épreuve développée à partir de celle de Jean-Pierre Chevalier, L’écriture spontanée, aide ou obstacle pour l’élève en difficulté face à l’écrit, 2002. Voir en annexe.
(29) La dictée à l’adulte est une situation pédagogique dans laquelle l’enfant met en forme un texte signifiant bien qu’il n’ait pas encore acquis une maîtrise suffisante des contraintes orthographiques et graphiques de la langue écrite. Grâce à la prise en charge, par un scripteur compétent, de la réalisation matérielle du texte, l’enfant, déchargé de l’acte graphique, s’attache à la structuration de son énonciation orale, évoluant du parler au dicter, il devient un énonciateur d’écrit. Il découvre, aussi le fonctionnement de la langue écrite et les difficultés liées à la mise en mots du texte et à sa composition. L’objectif prioritaire de la dictée à l’adulte est de rendre manifestes les opérations mentales à l’oeuvre dans l’écriture d’un texte, amenant progressivement l’enfant vers une production autonome. Voir, par ex. : Anne-Marie Chartier et al., Lire écrire 2. Produire des textes, 1998, Catherine Tauveron, Apprendre à lire – Bâtir une culture au CP, 1998 ou Jacques David, « La dictée à l’adulte ou comment de jeunes enfants oralisent l’écrit » in Études de linguistique appliquée, n° 81, 1991 et « Une activité de production d’écrit à l’école maternelle : la dictée à l’adulte » in Études de linguistique appliquée, n° 59, 1985.
(30) Rémi Brissiaud, Il croit que..., 2002.
(31) Op. cit., p. 3.
(32) Pourquoi n’ai-je pas eu l’idée de leur demander d’avoir systématiquement avec eux cet outil de la classe ? Volonté de “couper” avec leurs pratiques ordinaires ? - mais pourquoi ? Souhait de ne pas donner le sentiment de “juger” le travail de la collègue ? - et cela renvoie à la nécessité d’un temps d’élaboration commune avant l’installation de l’action ?
(33) Ginette Leblanc, Un micromonde d’écriture pour le premier cycle du primaire, 1985.
(34) Extraits de l’entretien dont le commentaire figure en pp. 20 et ss. du présent travail.
(35) Voir les postulats de Downing et Fijalkow déjà cités.
(36) Entretien cité.
(37) Les PPAP ont été créés par la Circulaire n° 98-229 du 18 novembre 1998 : « Utilisation des évaluations nationales CE2-6ème : mise en place du programme personnalisé d’aide et de progrès pour la maîtrise des langages » et par la Circulaire n° 2000-205 du 16 novembre 2000 : « Exploitations de l’évaluation nationale en CE2 : mettre en oeuvre des réponses pédagogiques adaptées ».
« Ce programme est bâti avec l’élève pour mieux cerner ses qualités puis les difficultés qu’il a rencontrées dans chaque épreuve de l’évaluation, mais aussi pour repérer les acquis et les motivations sur lesquels s’appuyer pour le travail à venir et pour l’associer à l’envie de progresser et de réussir. [...] À la suite de ce premier constat, le directeur de l’école réunit un conseil des maîtres pour faire le bilan et une analyse collective des résultats et des difficultés des élèves. Les réseaux d’aides spécialisées sont associés à cette réunion. Les maîtres du cycle 3 tirent les enseignements des résultats pour mettre en place des réponses plus individualisées aux besoins des élèves » (c’est moi qui souligne).
(38) La circulaire 2002-113 déjà citée indique : « S’il est vrai que l’école maternelle est le lieu privilégié où s’exprime pleinement la mission préventive car c’est le moment où s’ouvre le chemin des apprentissages scolaires, où les difficultés ne sont pas encore installées, [...] » (c’est moi qui souligne).
(39) L’action de prévention mise en place par le collègue dans ce dernier cas semble particulièrement intéressante à développer : il s’agissait pour lui de se placer en situation de recherche (autour d’activités ayant trait à la mémorisation) avec une classe de CE2 répartie en trois groupes, avec pour objectifs explicites un retour en classe (mutualisation d’outils construits par les élèves) et auprès des enseignants de toutes les classes de l’école (croisement des regards). Les facilitateurs qu’il souligne sont les suivants : 1. appui sur les activités des élèves, 2. lien avec les activités de la classe, 3. demande des enseignants d’une action et d’un retour sur l’action, 4. action vécue sur le mode de la recherche, du tâtonnement, 5. retour en classe où le maître E fait devant le maître ordinaire positionné comme observateur, 6. temps de l’action contractualisé, 7. sortie des élèves de la classe pour travailler sur un projet d’apprentissage, non parce qu’ils sont en difficulté dans un domaine.
(40) La démarche dans laquelle s’inscrit cet entretien, que j’ai préparé, est double : c’est celle de l’entretien d’explicitation tel qu’initié par Pierre Vermersch (voir Pratiques de l’entretien d’explicitation, 1993 : « Le terme d’entretien d’explicitation recouvre un ensemble de techniques qui vise à faciliter, à guider la description après coup du déroulement de sa propre action », p. 259) et celle décrite par Dominique Guichard dans son article « Méthodologie de l’entretien » de la revue de l’ARECE [Association de Recherche et d’Étude sur la Communication à l’École], Changement 2, n° 2, , 1991, pp. 43-49, particulièrement dans sa première partie, L’entretien avec l’enseignant : un rôle de clarification, pp. 43-47 (c’est moi qui souligne) qui montre l’intérêt qu’il y a à raisonner en terme de problème plutôt qu’en terme de difficulté.
(41) Ce modèle a été pointé par deux rapports de l’IGEN, celui rapporté par Bernard Gossot, Les Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté : examen de quelques situations départementales, MEN, 1995 et celui rapporté par Jean Ferrier, Améliorer l’efficacité de l’école primaire, MEN, 1998.
(42) Sur cet épineux problème, voir le dossier du n° 408 des Cahiers pédagogiques de 2002, Savoir, c’est pouvoir transférer ?. Un point, cependant, semble pouvoir réunir les tenants d’un parti ou de l’autre : le transfert est contextualisé, il ne s’installe pas de manière absolue mais en fonction de connaissances singulières, à partir desquelles une généralisation est possible dans le même champ de connaissances, il a partie liée avec la notion d’adaptation. « Les connaissances qu’un individu s’est construites sont viables dans la classe des situations dans laquelle il inscrit sa représentation de la situation et du contexte dans lequel il a créé ces connaissances » (c’est moi qui souligne), Philippe Jonnaert, « Une notion tenace », op. cit., p. 12.
(43) Georges Gauzente, « Animer et évaluer les RASED », 1999.
(44) Je m’inspire ici des travaux de Jacques Lapointe, particulièrement de « L’approche systémique et la techno­logie de l’éducation », 1999, repris du site Éducatechnologiques.
(45) Il n’y a derrière cette idée de “bienveillance” aucune connotation moralisante, mais une posture éthique : voir Georges Gauzente, art. cit. : « Travailler en réseau présuppose donc à la fois une reconnaissance du professionnel, de ses responsabilités, de sa capacité à évoluer, à changer. Cette option est incompatible avec une vision a priori carencée des acteurs » (c’est moi qui souligne).
(46) « Le travail en réseau ne va pas de soi : il s’agit de passer d’un système fondé sur des prises en charge liées à l’expertise des intervenants à une mise en synergie des ressources au bénéfice de l’enfant, on passe de la dimension instrumentale (cognitive, psychanalytique....) à une dimension systémique. », art. cit.
(47) Voir les travaux d’Edgar Morin sur la complexité, particulièrement : La complexité humaine, 1995 (rééd. 1998), présentés, par exemple, par Marcel Bolle De Bal, Voyages au cœur des sciences sociales, 1996 : « Le terme “complexe” renvoie, étymologiquement, à la notion de “tisser ensemble”, de relier des éléments séparés. Au coeur même de la pensée complexe se situe dès lors le concept de “reliance”, le démon politique d’Edgar Morin, selon l’affirmation de ce dernier, en tant qu’antonyme des phénomènes de “déliance” caractérisant la société contemporaine. Dans le cadre de celle-ci, quatre aspirations de reliance se manifestent avec de plus en plus d’acuité : des aspirations de reliance à soi (identité), de reliance aux autres (fraternité), de reliance au monde (citoyenneté) ainsi que de reliance entre les disciplines scientifiques (complexité). En d’autres termes : de reliance psychologique, sociale, culturelle (ou cosmique) et cognitive ».
(48) Voir, par exemple, dans l’œuvre du poète Yves Bonnefoy, comment s’articulent deux approches de l’espace : Dans le leurre du seuil (1975) versus Vrai lieu (1953). De manière plus pragmatique, il suffit de renvoyer à toutes ces situations où les enseignants parlent des élèves entre deux portes ou dans la salle des maîtres, tous lieux qui n’ont pas pour vocation d’être des lieux de travail en commun.
(49) Jean Greiner, « La prévention en psychologie scolaire », in Changement 2 – Pratique systémique en milieu scolaire, n° 2, 1991, pp. 73-74.
(50) Art. cit., p. 86 : « [La prédiction est] un savoir vrai ou supposé vrai sur un événement à venir ». Ce savoir par anticipation a cependant des avantages, ne serait-ce que parce qu’il permet et fonde la planification de nos actions.
(51) Voir l’article de Nicole Augras et Jean-Pierre Duchemin « Les circuits de la demande » in Changement 2 – Pratique systémique en milieu scolaire, n° 3, 1994-1995, pp. 11-19.
(52) Voir l’article de Philippe Perrenoud, « Réfléchir ou agir ensemble ? » in Éducateur, n° 12, 17 octobre 1997, pp. 8-11.
(53) Voir la note 39 p. 17.
(54) Voir Philippe Perrenoud, Enseigner : agir dans l’urgence, décider dans l’incertitude. Savoirs et compétences dans un métier complexe, 1996 (éd. 1999).
(55) Il ne s’agit pas ici d’une conception qui ferait de la démarche proposée le parangon à suivre. La notion de modélisation est à comprendre dans le sens “scientifique” du modèle, « représentation simplifié d’un processus, d’un système », Le petit Robert.
Voir, par exemple, Henri Planchon, « La modélisation », 2003 : « La modélisation est un système à la fois ouvert et fermé. Il est fermé pour soi, il est cohérence et cohésion, il se présente donc avec une certaine protection. Mais il est aussi ouvert et vulnérable s’il est soumis à des informations qui vont désorganiser son harmonie ; c’est un système ouvert et dynamique qui reste en perpétuel mouvement, que ce soit par des apports venant du concepteur ou de par des confrontations avec d’autres systèmes venant de l’extérieur [...] Réaliser une modélisation, c’est élaborer un tout, une globalité d’éléments en interrelations, une forme bouclée [...] elle se présente toujours à travers une complexité, un réseau à l’intérieur desquels les relations ont autant d’importance que les éléments eux-mêmes » (c’est moi qui souligne).
(56) Je suis ici la démarche proposée, dans un autre contexte, par Grégoire Évéquoz dans son article « Y a-t-il un pilote dans la classe ? », in Changement 2, n° 3, pp. 69-90, particulièrement la 3ème partie : L’intervention systémique sur la classe, pp. 75-82.
(57) « Dans une classe, le pilotage a pour but de promouvoir l’unité interne du groupe, d’obtenir la coopération et la cohésion, d’organiser les efforts des individus dans la perspective de l’ensemble du groupe, d’aider le système à effectuer des réajustements et à résoudre les conflits internes », art. cit., p. 71.
(58) Art. cit., p. 75.
(59) Connu pour ses travaux sur l’hypnose, Milton Erickson insiste sur la dimension active de celle-ci : pour lui, l’activation de l’Inconscient est conçue en terme d’apprentissage et de déconditionnement. Il ne s’agit pas d’un état passif, mais au contraire d’un état dans lequel le sujet est très actif, où il peut faire appel à des ressources qui lui sont propres et dont il n’a pas forcément conscience. Il s’opère des remaniements internes, sans que le processus puisse être analysé par la conscience.
(60) Voir, par exemple, dans l’ouvrage déjà cité note 40 p. 20, la présentation que Pierre Vermersch fait du langage ericksonien : Erickson « a développé des formulations permettant de guider l’activité cognitive du sujet alors que celui-ci n’est pas disponible pour répondre verbalement [...]. L’entretien d’explicitation n’utilise pas et n’est pas de l’hypnose, mais quand le sujet est en évocation de la situation passée il est intéressant de pouvoir le guider dans sa description alors que l’on n’en connaît pas encore le contenu. Pour cela on peut utiliser des formulations qui n’ont de sens précis que pour celui à qui elles s’adressent. [...] Il est donc possible de s’adresser très précisément à quelqu’un sans connaître le contenu de son activité cognitive. Ces formulations sont très utiles pour opérer des relances quand on ignore le contenu de ce que l’on vise ».
(61) Voir, par exemple, la circulaire 2002-113 déjà citée.
(62) Circulaire 2002-113 déjà citée.
(63) Référentiels déjà cités.
(64) Voir le document travaillé en formation et joint en annexe : Agnès Thabuy, Nature et spécificité de l’accompagnement par le maître E, formation CAPSAIS, document interne, 2004.

 
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